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Une journée chez les réfugiés à Bruxelles: Ils sont syriens, somaliens et même marocains…

© D.R

«Et si c’était toi ?». Cette inscription t’interpelle à Bruxelles si tu passes près du parc Maximilien transformé depuis plus de trois semaines en campement de réfugiés. Syriens, Irakiens, Afghans, Somaliens…  et même des Marocains parmi eux, ces centaines de candidats à l’asile, ces sans-papiers ont côtoyé la mort avant d’arriver là, en face du bâtiment de l’Office des étrangers.
 
«Ici, c’est le paradis»

 «Ici, même si on est logé dans des tentes de fortune, je me sens véritablement humain, je peux vivre en sécurité. C’est un paradis comparé à ce que nous vivions chez nous : à Bagdad, c’est chaque jour quatre explosions. Daech, les conflits ethniques et inter-religions, les milices, la peur, c’était notre pain quotidien», confie Ahmed, un jeune Irakien.
Selon lui, plusieurs Irakiens ont été empêchés de quitter le pays par le gouvernement irakien prétextant que la sécurité règne au pays.
«Le ministère des affaires étrangères irakien pousse même l’aberration jusqu’à réclamer le retour de tous les Irakiens en situation irrégulière en Europe, alors que si l’on revient la mort assurée nous attend», s’indigne Ahmed. Pour atteindre la Belgique, lui et toute sa famille ont déboursé 3.000 euros. Ils ont dû traverser les frontières turques pour rejoindre la Grèce en passant par l’île de Chios, puis plusieurs pays européens pour être enfin à Bruxelles.
 
Seize jours de route, de souffrance et d’angoisse

 Même itinéraire ou presque pour cette jeune femme syrienne : «Seize jours de route. Nous avons payé 3.500 euros. Mais le prix de la souffrance physique et morale est plus immense : épuisement, angoisse, risque d’emprisonnement, on a subi violence, maltraitance, insultes… ».
Pourquoi ? Même réponse à quelques nuances près : «Nous avons fui la guerre, les bombes, les massacres, la haine, les égorgements…»
«Je n’ai jamais imaginé quitter un jour mon pays. Mais nous n’avons pas eu d’autres choix. Aussi, nous aurions voulu nous diriger vers des pays arabes, mais l’image qu’ont parfois les populations de nous, est épouvantable. Nous ne sommes pas des terroristes, nous ne sommes pas des mendiants, nous ne sommes pas des lâches qui ont abandonné leur terre», déclare un jeune activiste syrien qui a été emprisonné par le régime Bachar et qui est installé en Belgique depuis trois ans. Aujourd’hui, il est venu au camp prêter main forte aux bénévoles et ONG présents sur place.  
Ayan, lui, vient de Somalie. Cela fait deux mois qu’il est à Bruxelles. Et il vit déjà dans un camp de demandeurs d’asile. Nous l’avons rencontré au parc, alors qu’il rendait visite à de nouveaux arrivés. «Je viens du sud de la Somalie. J’ai fui le mouvement des Chabab. Pour 2.000 dollars, je suis passé par le Soudan, puis par la Libye d’où j’ai traversé la Méditerranée vers Lampedusa dans une embarcation de fortune…».
 
«Et si c’était moi ?»

A presque quelques mètres des bureaux de la Commission européenne, ce camp de fortune qui contraste avec les imposantes tours qui l’entourent a pris forme à partir de fin août 2015 grâce à des initiatives citoyennes.
A côté des centaines de tentes, d’abris, de sacs, et au milieu des groupes qui se font et se défont au gré de discussions, il y a plein de bénévoles. On les reconnaît à leurs chasubles ou gilets fluorescents. Certains ont mis sur place une petite école pour les enfants. D’autres s’occupent de la cuisine, de la collecte de déchets, de l’assistance juridique ou encore de l’animation. Des terrains de foot en gazon synthétique sont aussi installés.
Il y a même des vendeurs de crêpes bretonnes qui viennent gracieusement distribuer leurs produits. Ils sont des centaines de citoyens, de bénévoles qui passent par jour, ils peuvent rester une demi-heure, jusqu’à une heure.
«Depuis longtemps, je regarde sur les réseaux sociaux et sur la télé… Et là, je me dis : Ah ! Maintenant, ça suffit de regarder ! Il faut agir», a confié à ALM Monique Denoël, une enseignante venue pour aider et comprendre le parcours de ces enfants syriens qu’elle voit de plus en plus atterrir dans l’école où elle travaille. «On a pas mal de Marocains et d’Algériens. Ils savent parler arabe. Quand, par exemple, il y a des enfants qui pleurent, ils viennent aider», ajoute Mme Denoël. Monique est aujourd’hui là parce que «mes parents me parlaient souvent de l’époque où ils ont évacué entre 1944 et 1945. Il y avait des Français qui les avaient aidés et qui leur avaient prêté leur maison, etc. Donc, oui ! On se met à leur place. Franchement, on se dit : qu’est-ce qu’on aimerait bien recevoir comme accueil. On est humains».
Fatima, elle, est une Marocaine résidant en Belgique. Elle aussi est bénévole. «Mon mari est syrien, j’ai toujours été bien reçue en Syrie. A mon tour, j’essaie de réserver le meilleur accueil à ces gens qui, il n’y a pas longtemps, vivaient bien chez eux».Des dons, vêtements, nourriture, couvertures, etc. affluent massivement des riverains, des Bruxellois, des communautés maghrébine, arabe et turque de Belgique.
 
Des ONG et des officiels

On peut également apercevoir avec leurs stands des ONG comme Médecins du Monde, Médecins sans frontières, ou encore un organisme officiel comme le SAMU social. Tous sont venus en renfort se greffer à la plate-forme quelques jours après la formation du camp. «Le gouvernement n’a réagi que beaucoup plus tard. Il a proposé 500 places dans un bâtiment de bureaux transformé en dortoir. De minuscules places séparées chacune de l’autre par 15 cm. Mais, une grande majorité des gens a préféré rester ici dans la nature, le temps qu’il faut», explique ce Bruxellois. Mais selon les observateurs, la Belgique est à peine au début du flux des réfugiés. D’ailleurs, ce jour même, le gouvernement se réunissait pour examiner la possibilité d’ouvrir 8.000 places d’accueil.
 
Parcours d’un jeune marocain : «Une seule chose en tête, arriver à Bruxelles»

Saad, 21 ans, est originaire d’Errachidia. Il a mis les pieds dans la capitale de l’Europe, il y a 8 mois. «Depuis que je suis sorti de chez moi, j’étais prêt à tous les risques», lance ce jeune mécanicien décidé à trouver un meilleur horizon. Son parcours: «D’Errachidia, vers Oujda, puis Beni Drar. J’ai traversé la frontière algérienne, je suis arrivé en Libye à Tripoli, j’y suis resté 10 jours, avant de traverser en barque vers Lampedusa pour 600 euros. De là, j’ai foncé jusqu’à Milano, puis direction la frontière suisse jusqu’à Zurich en train, avant d’atteindre la frontière avec la France, puis Strasbourg, et le Luxembourg… J’avais une seule chose en tête : arriver à Bruxelles». Une véritable aventure qu’il a menée toujours en solitaire, à l’instar de la plupart des Marocains rencontrés par ALM. Il y en a parmi eux qui sont là depuis 2009, et même un cas depuis 2000.
 
S.O.S des Marocains

Bien avant les ONG, dès les premières arrivées massives de réfugiés, des collectifs de sans-papiers composés majoritairement de Marocains se sont très vite mis en route pour distribuer la nourriture et les aides.
«Ce sont les sans-abri qui dormaient dans la Gare du Nord, pas loin du parc qui ont exprimé en premier leur solidarité. Ce sont des gens honnêtes mais qui n’ont pas la possibilité d’avoir des logements, un travail. Si on nous donne nos papiers, nous irons travailler de nos propres mains pour participer à l’essor de ce pays et au développement de notre pays d’origine», souligne Hamid, marocain, la quarantaine.

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