Culture

Best-sellers, version Maroc

Le directeur des éditions Eddif est fier de sa meilleure réussite dans les librairies. Il s’agit de «Au-delà de toute pudeur» de Soumaya Nouâman Guessous. Quarante-quatre mille exemplaires en 10 ans.
L’audace du sujet est pour beaucoup dans le succès de ce livre. Selon Abdelkader Retnani, «Les Marocains ont acheté ce livre, parce qu’il est le premier à briser un tabou sur la sexualité féminine. Le bouche-à-oreille a opéré à merveille. Le livre est devenu en très peu de temps un best-seller. Et jusqu’à ce jour, il continue de se vendre». Les livres traitant de sexualité dans la société marocaine se portent ainsi bien. En atteste le deuxième livre qui a fait le meilleur chiffre de ventes chez Eddif. Il s’agit de «Amour circoncis» de Abdelhak Serhane.
Près de 7500 exemplaires ont été vendus sur trois ans. Les choses de la chair, mais selon une optique masculine cette fois-ci, expliquent le succès de ce livre. En troisième position vient un livre qui traite d’histoire, mais avec un fort relent de sexualité. Il s’agit de «Soldats domestiques et concubines» de Mohamed Ennaji. Ce livre s’est vendu à 7000 exemplaires sur une durée de quatre ans. Il traite du règne de Moulay Ismaël au XVIIe siècle et des soldats noirs que ce sultan a fait venir de l’Afrique subsaharienne. «Tous les essais qui concernent la société marocaine trouvent des lecteurs» précise Abdelkader Retnani. Et ce n’est pas Bichre Bennani, directeur des éditions Tarik, qui dira le contraire. «Tazmamart, cellule 10» de Ahmed Marzouki s’est très bien vendu.
Près de 45 mille exemplaires ont trouvé acheteur en moins de deux ans. Il s’agit de l’une des plus belles réussites de l’édition marocaine. Bichre Bennani explique l’engouement des lecteurs pour ce livre en ces termes : «Il s’agit d’une expérience exceptionnelle. Une personne passe 20 ans dans un mouroir et en sort vivante. Elle raconte la réalité de son vécu. Les Marocains sont à la recherche de vérité». Ce livre participe en effet de ces témoignages basés sur l’expérience de la réclusion. Il rappelle par certains aspects le récit d’Alexandre Soljenitsyne «Une journée d’Ivan Denissovitch». En deuxième position vient «Héros sans gloire» de Mehdi Bennouna. Plus de 12 mille exemplaires vendus en moins de 4 mois. Sa réussite dans les librairies est en partie liée à «l’Histoire contemporaine du Maroc» explique le directeur des éditions Tarik. Il ajoute qu’il s’agit «d’une Histoire vraie, non colorée. C’est une version non officielle des faits, fondée sur des témoignages de personnes encore en vie». Bichre Bennani estime que les Marocains sont à la recherche de livres qui leur apprennent des choses sur leur Histoire et leur société. Les lecteurs sont avides de connaître la vraie version de l’Histoire contemporaine de leur pays, insiste-il. La troisième meilleure vente des éditions Tarik est à mettre sur le compte de «Espérance brisée» d’Ignace Dalle.
L’ancien directeur du bureau de l’AFP à Rabat a donné sa vision de l’Histoire récente au Maroc. Son livre s’est vendu à 6000 exemplaires en une année. L’Histoire du Maroc intéresse ainsi les Marocains, mais ils ne rejettent pas pour autant les livres pratiques. «Plantes médicinales du Maroc» s’est vendu à 27 exemplaires, selon Leïla Chaouni, directrice des éditions Le Fennec. La version en français a été vendue en 19 000 exemplaires, la traduction arabe en 7000. «C’est un livre pratique, agréable à lire. Le nom de la plante est traduit à chaque fois en plusieurs langues.
Le concept du livre répond à une attente du public, et c’est ce qui en explique le succès». Les écrits de Fatima Mernissi que les éditions Le Fennec distribuent sur le Maghreb et les pays arabes se portent également bien, selon Leïla Chaouni. L’on sait que cette sociologue y traite des problèmes de la femme et des contraintes de la religion qui ne sont pas toujours conformes avec son désir de liberté.
Leïla Chaouni déplore toutefois que les livres de Fatima Mernissi se vendent moins bien au Maroc qu’à l’étranger. Et la littérature dans cette petite liste de best-sellers ? Elle est incontestablement négligée par les éditeurs marocains. Ces derniers sont davantage enclins à publier des essais. Bichre Bennani dit que les Marocains ne sont pas encore à la recherche de la grande littérature. Eddif édite des fictions, mais elles ne sont pas en mesure de tenir la dragée haute aux essais. «Un Marocain à New York», le roman de Youssef Amine El Alami, est le best-seller en la matière. Près de 5000 exemplaires vendus en trois ans. Ce livre est loin de constituer un exemple probant de la littérature au Maroc. Peut-être que le jour où nos meilleurs auteurs publieront leurs romans ici, la littérature pourra rivaliser avec les essais.

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