Société

Nouveau code pénale : Tout sauf Ramadan

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Le ministère de la justice et des libertés est bien prêt à dialoguer à propos du code pénal, mais dans les limites qu’il aura tracées. Ces limites excluent tout ce qui pourrait porter atteinte aux mœurs et aux valeurs de la société, selon Mustapha Ramid. Lors d’une conférence nationale sur les nouveautés de l’avant-projet de code pénal proposé par le département de la justice tenue hier lundi à Rabat, le ministre a affirmé qu’il n’était pas question de revoir les articles relatifs aux valeurs de l’Islam.

«Il ne faut pas penser que l’on va décriminaliser les relations sexuelles illégitimes ou les repas publics pendant le Ramadan», a déclaré Mustapha Ramid. «Nous avons bien reçu certaines propositions de ce type dans la plate-forme que nous avons mise en ligne, mais elles sont contre les valeurs de notre société et remettent en question l’islamité de notre pays», a-t-il ajouté.

Cette déclaration intervient alors que la publication de l’avant-projet de code pénal avait suscité une vive polémique sur les réseaux sociaux et parmi les acteurs de la société civile. Les articles les plus controversés étaient justement ceux relatifs aux libertés individuelles, notamment l’article 420 assimilé à une banalisation des crimes d’honneur par certains internautes marocains.

Le ministre de la justice et des libertés a, par ailleurs, tenu à rappeler que le chantier du nouveau code pénal avait débuté en 2004 lorsqu’une première version avait été élaborée par le département de tutelle puis présentée au Conseil consultatif des droits de l’Homme (devenu depuis Conseil national des droits de l’Homme).

«Le conseil avait donné son avis, puis le projet a été perdu de vue», a précisé Ramid, soulignant que «le débat a refait surface aujourd’hui parce que la conjoncture est favorable. Le Maroc a connu une évolution significative en termes de liberté et de respect des droits  de l’Homme». Un comité scientifique composé d’experts juridiques, d’avocats et d’académiciens avait alors travaillé pendant deux mois sur l’élaboration de cet avant-projet.

Globalement, si l’on compare cet avant-projet au Code pénal actuellement en vigueur, 40 articles ont été supprimés, 187 ajoutés et 576 modifiés. Ces changements comprennent la criminalisation de certains actes tels que le trafic d’êtres humains ou l’incitation à la haine, la levée de la criminalisation sur d’autres comme la mendicité et l’intégration de certains crimes qui dépendaient auparavant de codes spécifiques tels que le trafic d’organes.

En ce qui concerne la modification de certains articles, elle a notamment concerné l’intégration de l’espace virtuel dans certains crimes, tels que le harcèlement sexuel et l’atteinte à la vie privée. Certains concepts et notions ont été élargis, tels que la torture qui n’est plus limitée à celle pratiquée par un fonctionnaire de l’Etat et la discrimination qui est prise dans un sens plus large avec l’objectif de garantir justice et égalité. Ces changements ont également touché les crimes financiers, notamment le détournement de fonds, la corruption et l’abus de pouvoir dont les sanctions ont été révisées.

L’abolition de la peine de mort attendra

«Nous comptons procéder à une abolition progressive de la peine de mort, conformément aux recommandations de l’Instance équité et réconciliation», a déclaré Mustapha Ramid, ministre de la justice et des libertés. Si cette déclaration est loin de satisfaire les nombreux détracteurs de la peine de mort même au sein du département de la justice, elle augure néanmoins d’une évolution positive de la situation. Dans l’avant-projet de code pénal présenté par le ministère de la justice et des libertés, le nombre de crimes punis par la peine de mort a été réduit du tiers, passant de 31 à 11.

«Nous avons limité la peine de mort aux crimes très graves, horribles et inhumains», a expliqué Ramid. Il s’agit, dans la pratique, des homicides aggravés des crimes s’inscrivant dans la législation mondiale des droits de l’Homme et de certains actes portant atteinte à la sécurité intérieure et extérieure du pays. Il est à noter que la peine de mort est abolie de facto au Maroc depuis plus d’une vingtaine d’années. La dernière exécution date de 1993.

En ce qui concerne la prison à perpétuité, 27 articles prévoyant cette sanction ont été révisés, 13 d’entre eux ont été transformés en peine limitée, tandis que 23 articles qui prévoyaient la peine de mort sanctionnent à présent par la prison à perpétuité. Globalement, 37 articles prévoient la perpétuité pour des crimes de terrorisme, de torture ou encore d’homicide aggravé.

De nouveaux crimes pour un nouveau code pénal

De nombreux actes ont été criminalisés par l’avant-projet de code pénal élaboré par le département de la justice et des libertés. Les génocides, crimes de guerre et crimes contre l’humanité font partie de cette catégorie, conformément aux dispositions des quatre conventions de Genève relatives au droit international et au statut de Rome, législation de base de la Cour pénale internationale (CPI).

Les nouveautés de l’avant-projet dans le domaine des droits de l’Homme comprennent, par ailleurs, la criminalisation du mercenariat, de la disparition forcée, du trafic d’êtres humains, de la discrimination, de l’incitation à la haine et de l’outrage aux religions.

La protection de la famille et des mineurs est le domaine avec le plus grand nombre de nouveautés. Elles comprennent, notamment, l’aggravation de toutes sortes de crimes dans le cas de l’implication d’un mineur (trafic de drogue, prostitution, viol, etc.), mais également la criminalisation de la négligence des devoirs des époux et celle du mariage forcé. En ce qui concerne les crimes financiers, l’atteinte à la compétitivité est considérée comme un crime par cet avant-projet, tout comme la corruption dans le secteur privé et l’enrichissement illicite.

 

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