Chroniques

Mieux vaut en rire: Le Maroc a changé, les Marocains pas encore…

© D.R

J’étais même un activiste dans le sens où j’étais un passionné actif mêlant l’acte à la parole et parfois l’écrit à l’action. Bref, en un mot comme en mille, j’étais un militant. Oui, je sais que c’est un terme qui est aujourd’hui vieux jeu, mais je crois que c’est parce que ce sont les militants qui, en vieillissant, sont devenus ringards. Du coup, tous ceux qui ne sont pas contents et qui poussent leur humeur jusqu’à hausser le ton sont assimilés à des anciens combattants.

Pourtant, croyez-moi, savoir dire non, et finir par le dire, procure parfois une grande joie et un immense plaisir qui ne peuvent que vous rajeunir. Normalement ce sont les béni-oui-oui qui, à force de soumissions et de courbettes, finissent par courber l’échine et devenir séniles.

Si je vous raconte tout ça, c’est pour vous dire que je ne regrette pas du tout d’avoir été, et d’être encore un petit peu aujourd’hui, dans le camp des gueulards, parce que, voyez-vous, je constate presque chaque jour que ce n’était pas pour rien et que, finalement, à bien y regarder, notre pays est bel et bien en train de changer. Oui, c’est vrai que je passe souvent mon temps à râler, à dire et à écrire que telle chose ne va pas bien, que telle autre fonctionne mal, que tel responsable se comporte n’importe comment et que tel autre fait vraiment n’importe quoi. Si je dis, j’écris ou bien je râle contre tout ça, c’est d’une part parce que souvent ce n’est pas toujours faux et d’autre part, c’est que j’aime tellement ce bled, et je suis loin d’être le seul, que j’ai envie qu’il ne soit pas seulement le plus beau, mais aussi le plus parfait.

Et là, j’arrive aux positivistes chroniques et aux suffisants qui croient qu’en criant tout le temps très fort que tout va pour le mieux dans le meilleur des Maroc possibles, ils vont finir par nous convaincre qu’ils sont plus Marocains et plus nationalistes que tout le monde. D’ailleurs, si vous regardez bien ces gens-là, ou mieux, si vous enquêtez bien sur eux, vous allez très vite en déduire qu’ils ont beaucoup de choses à se reprocher. Peut-être que leur discours continu d’admiration béate et infinie pour ce pays n’est là que pour cacher leur comportement qui n’a rien d’exemplaire.

Je ne parle pas forcément de tous ces commis de service vils et serviles qui se reconnaîtront, ni de tous ces faux dévots qui passent directement des lieux sombres de débauche de la nuit à la mosquée du quartier pour la prière de l’aube. Ceux-là, quoi qu’ils fassent, on les connaît et on les reconnaît. Pour moi, les plus dangereux et les plus sournois, ce sont tous ces messieurs tout-le-Monde qui n’ont ni responsabilité, ni pouvoir, ni même de fric, mais qui trouvent un malin plaisir à tomber à bras raccourcis sur tout râleur qui, à tort ou à raison, là n’est pas la question, exprime son mécontentement ou son désarroi.

Pour eux, des gens comme ça ont de la chance de ne plus vivre comme dans les temps anciens où il suffisait d’ouvrir la bouche pour se retrouver aussi vite enfermé en taule à double tour. Ils n’arrivent pas à comprendre, tout issus du peuple qu’ils sont ou qu’ils prétendent être, que, justement, l’ère de naguère est finie, et que désormais on a le droit de dire ce qu’on veut, voire jusqu’à dire que ça va très mal même quand ça va très bien. On appelle ça la liberté d’expression et qui n’existe que dans les démocraties, y compris celles qui ne sont pas encore parfaites comme c’est le cas pour la nôtre. Voilà, j’avais vraiment envie de dire tout ça, et je l’ai dit. Maintenant, je sais que ça ne va pas faire plaisir à tout le monde, mais, justement là aussi, la démocratie ce n’est pas de plaire à tous mais d’avoir la possibilité de dire et de faire ce qu’on veut sans craindre ni les gouvernants ni les gouvernés.

En attendant d’être bien compris de tous, y compris de ceux qui ne veulent jamais rien comprendre, je souhaite à tous les râleurs invétérés mais honnêtes un très bon week-end. Quant aux autres…
Un dernier mot sous forme de devinette pour rigoler un peu : pourquoi on aime toujours donner les bons chiffres en criant et les mauvais chiffres en chuchotant ?

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