Janis Joplin : Interprète du mal-être

Née le 19 janvier 1943, Janis Lyn Joplin est initiée  à la musique par ses parents. Très tôt, elle s’engage en faveur des Noirs, dont le problème d’intégration constituait alors l’un des thèmes majeurs d’affrontement au sein de la société nord-américaine. Très vite attirée par la musique «black», adolescente, elle commence à chanter dans des cafés et des clubs folks de Houston et d’Austin. Dès 1960, elle enregistre des disques de tendance jazz. Dépressive, elle s’adonne à l’alcool et à la drogue pour oublier un physique ingrat qui lui vaudra le titre de la personne la plus laide du campus de l’Université d’Austin.
A partir de 1961, Janis part s’installer à Venice, quartier beatniks de Los Angeles, où elle rencontre Chet Helms, manager d’un groupe de blues rock psychédélique, «Big Brother and the Holding Compagny». Le manager arrive à la convaincre de venir chanter avec eux. La performance hallucinante de Janis ne se fait pas attendre, notamment grâce à l’interprétation de «Ball & Chain», une chanson de Big Mama Thornton, qui est pour certains d’une intensité proche de la transe. Chantant comme peu (ou pas) de Blanches qui l’ont fait avant elle, Janis attire l’attention d’Albert Grossman CBS, imprésario de Bob Dylan, qui rachète en 1968 le contrat du groupe à Mainstream. Au cours de la même année, elle sort son premier album pour Columbia, «Cheap Thrills».
La pochette de Robert Crumb, dessinateur vedette de la contre-culture, les reprises de «Piece of my heart» (Emma Franklin) et «Summertime» (George Gershwin) font de l’album un énorme succès (plus d’un million d’exemplaires vendus au 1er mois) et propulsent Janis au premier rang.  Très vite, Grossman la pousse à quitter «Big Brother». En 1969, elle se produit avec son nouveau groupe, le «Kozmic Blues», teinté de soul rythm’n’blues à géométrie fluctuante, tout comme le penchant de sa chanteuse, droguée et imbibée de Southern Comfort, alcool dont elle va tellement doper les ventes que la compagnie lui offrira un manteau en fourrure. En novembre de la même année, paraît «I Got Dem Ol’ Kozmic Blues Again Mama», avec notamment « Try» («Just A Little Bit Harder») et «Work Me Lord».
L’album, très soul, se révèle être un énorme succès. Ce qui n’empêche pas le groupe de se séparer, après avoir subi les foudres de la critique. On lui reproche notamment de ne pas être à la hauteur de sa chanteuse et les errements d’une Janis évoluant en permanence aux frontières de la conscience, déjà soumise à l’héroïne. Début 70, la vie de Janis paraît enfin plus stable : elle est amoureuse et ravie de son nouveau groupe, le «Full Tilt Boogie Band», de loin son meilleur. Après une tournée canadienne avec le «Grateful Dead», le groupe rentre en studio à la fin de l’été pour enregistrer ce qui sera le dernier album de Janis, qui ne le verra pas terminé. La chanteuse est retrouvée morte dans sa chambre d’hôtel à Santa Monica, le 4 octobre 1970.
«Pearl» (son surnom) sortira en 1971, avec «Cry Baby», «Mercedes Benz» (écrit par Janis et chanté quasiment a capella) et le célèbre «Me And Bobby McGee», écrit par Kris Kristofferson. Sortiront, ensuite, un live, «Janis Joplin In Concert», un album d’inédits de «Big Brother», «Farewell», un live de 66, «Cheaper Thrills», un coffret Janis, regroupant l’intégrale de ses enregistrements, sans oublier «The Rose», film de Mark Rydell, dans lequel Bette Midler interprète un personnage fortement inspiré de sa vie.  Janis Joplin reste une chanteuse et un personnage d’exception, interprète inégalée du mal-être et de la solitude qui l’ont forgée, pour le meilleur et pour le pire. «Sur scène, je fais l’amour à 25.000 personnes. Après, je rentre à la maison, seule», disait-elle. Quelques mots qui résument toute une vie.