Culture

Comment les Marocains célèbrent la fête du sacrifice

© D.R

Le mouton est la vedette incontestée du jour de la fête du sacrifice. Sa chair est dégustée sans compter. La cuisine marocaine, considérée comme l’une des plus savoureuses et des plus fines au monde, présente des plats aussi riches que diversifiés pour fêter ce grand jour. La région orientale fait de la «bakbouka» sa spécialité. Un plat préparé avec les tripes de l’agneau, du riz, des pois chiches, du foie, etc. On peut déguster la «bakbouka» chaude, froide, découpée comme de la charcuterie, et accompagnée d’un verre de thé à la menthe. Pour leur part, les femmes tangéroises tiennent à respecter quelques habitudes et traditions culinaires spécifiques à l’Aïd Al Adha. Les préparatifs pour cette journée exceptionnelle commencent tôt. Elles préparent des gâteaux quelques jours auparavant. Ces délices traditionnels vont être servis le matin juste après la prière de l’Aïd et lors des visites des proches et amis. La veille de ce grand jour, les femmes au foyer passent une grande partie de la nuit à préparer la pâte pour le pain (khobz d’Al Aïd), à laquelle est rajoutée, contrairement aux jours ordinaires, de l’eau de fleur d’oranger (mazhar), de lait, des grains de sésame (jenjlane) et d’anis vert (habet hlaoua).
Beaucoup de ces femmes préfèrent cuire le pain dans le four du quartier qui reste ouvert spécialement à cette occasion jusqu’au lendemain matin. Le sacrifice du mouton se déroule dans la grande joie, aussi bien dans les quartiers populaires que dans les quartiers chic de Tanger. Tous les membres de la famille mettent la main à la pâte et participent au dépeçage du mouton. Les Tangérois montrent en cette journée une grande solidarité, les voisins s’entraidant entre eux dans l’accomplissement des tâches qui suivent l’égorgement du mouton. Par respect des traditions ancestrales spécifiques à cette fête religieuse, les Tangérois ne mangent le premier jour de l’Aïd que les abats du mouton. Le début de l’après-midi de cette première journée est distingué par l’odeur émanant de la cuisson des brochettes de foie et celle de la tête et les pattes grillées. Le deuxième jour à l’heure du déjeuner, tous les membres de famille doivent se réunir autour de la table pour manger le couscous avec la tête du mouton. Pour les anciennes familles tangéroises, le découpage du mouton ne se fait  que le troisième jour de la fête. Et c’est à partir de cette journée que les femmes, qui sont de véritables cordons bleus, s’activent à préparer les «chhiwate», délices de la cuisine marocaine tels Mrouzia faite surtout avec le miel, le beurre rance (smen) et Ras El Hanout ou l’épaule cuite à la vapeur.
Cap Sud ! Direction la ville ocre. Ici, à Marrakech, la «tanjia» est considérée comme étant le plat favori des Marrakchis. Une jarre en terre cuite où on met de la viande coupée en morceaux de 100g et bien rincée à l’eau froide. On ferme le tout avec du papier et une ficelle. On la porte au hammam pour la faire cuire dans les cendres chaudes du bain maure «fernatchi».
À défaut de tout cela, on peut se contenter d’une cocotte minute avec 3 verres d’eau et laisser cuire la viande coupée en morceaux pendant 2h à feu doux ou 3h au four dans un fait-tout. La «tkalia» ou «douara» est un autre plat connu, non seulement à Marrakech, mais aussi dans toutes les villes du Royaume.
L’art culinaire mellali est connu, par ailleurs, par la richesse de ses plats délicieux et convoités. Le matin du jour du sacrifice, les femmes préparent du pain trempé dans de l’huile d’olive, du beurre et du miel… Les familles à Beni Mellal sont très solidaires. On aime toujours se réunir avec les voisins autour d’une même table. Le soir, la tradition veut que l’on découpe l’épaule droite du mouton, appelée magloufa, pour le dîner. La tête du mouton doit être consommée le jour suivant au petit-déjeuner avec des oignons, du sel et du persil. À l’occasion de la fête du sacrifice, les régions de Mghila et d’Ouled Saïd, près de Ouled Ayad de Beni Mellal, sont connues par une danse appelée «naga et nmar», ou la chamelle et le tigre. Un homme porte des vêtements tachetés de noir comme la peau du tigre et une queue, et quatre autres individus portent un grand tissu et se déplacent comme une chamelle. Aussi, des hommes jouant de la musique chaâbie font le tour de quelques douars de Beni Mellal pour réunir «lgadid et lkourdass» : des morceaux de viande trempés dans les épices et séchés au soleil pendant plusieurs jours. À Ouarzazate, Aid El Adha est appelé «Tafasska». Les habitants de cette région commencent par préparer des plats berbères comme le «her-Ber», la soupe, «aghrom ntdount», etc. La table de l’Aïd à Ouarzazate comprend des plats de méchoui  et de brochettes. Dans nos provinces sahariennes, la fête du sacrifice constitue une occasion pour goûter la viande du mouton, qui reste peu consommée dans une région où la viande du dromadaire est dominante.
Lors de cette fête, les Sahraouis, notamment les nomades préparent leurs plats délicieux : «chwa». On le prépare en mettant les morceaux de viande à l’intérieur des tripes telle une grande poche ouverte et dont l’ouverture tient à un des talons de la bête. Cette poche est ensuite enterrée dans le sable chaud couvert d’un feu de bois.
La viande est ensuite dégagée du sable. Elle prend alors la forme de «kidr» gardant ainsi les saveurs de la viande. La fête du sacrifice au Maroc ne s’attache pas uniquement à l’art culinaire, c’est aussi une occasion pour renforcer les liens familiaux.
Durant les journées de la fête, des visites sont échangées entre les membres des familles. Pour célébrer ce grand jour, les habitants de certaines régions du pays chantent des poèmes antiques et des textes religieux. La fête du sacrifice au Maroc constitue un moment de rencontre et de partage.

• Siham Jadraoui et Soufiane Belhaj

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